NFT et propriété intellectuelle : les défis juridiques pour protéger les créateurs à l’ère du numérique

L’essor fulgurant des NFT (jetons non fongibles) bouleverse le monde de l’art numérique et soulève de nombreuses questions juridiques inédites. Entre opportunités pour les créateurs et risques de contrefaçon, le droit de la propriété intellectuelle est mis à l’épreuve. Décryptage des enjeux et solutions pour encadrer cette nouvelle forme d’actif numérique.

Qu’est-ce qu’un NFT et comment fonctionne-t-il ?

Un NFT (Non-Fungible Token) est un certificat numérique unique enregistré sur une blockchain. Il permet d’attester de la propriété et de l’authenticité d’un actif numérique, comme une œuvre d’art, une vidéo ou un tweet. Contrairement aux cryptomonnaies, chaque NFT est unique et non interchangeable.

Le fonctionnement repose sur la technologie de la blockchain, un registre décentralisé et infalsifiable. Le NFT contient des métadonnées sur l’œuvre (titre, auteur, date de création) ainsi qu’un lien vers le fichier numérique. L’achat d’un NFT s’effectue généralement en cryptomonnaies sur des plateformes spécialisées.

Les avantages des NFT pour les créateurs numériques

Pour les artistes et créateurs de contenu, les NFT offrent de nouvelles opportunités :

Rémunération directe : les NFT permettent de vendre des œuvres numériques sans intermédiaire et de toucher des royalties sur les reventes.

Preuve d’authenticité : le NFT certifie l’origine et la rareté d’une œuvre numérique, lui conférant une valeur.

Nouveaux modèles économiques : possibilité de fractionner la propriété d’une œuvre ou de créer des collections limitées.

Visibilité accrue : le marché des NFT attire l’attention des médias et collectionneurs sur l’art numérique.

Les défis juridiques posés par les NFT

L’émergence des NFT soulève de nombreuses questions en matière de propriété intellectuelle :

Droit d’auteur : l’achat d’un NFT ne confère pas automatiquement les droits d’auteur sur l’œuvre sous-jacente. La distinction entre propriété du NFT et droits d’exploitation de l’œuvre doit être clarifiée.

Contrefaçon : le risque de « minting » (création de NFT) d’œuvres sans l’autorisation des ayants droit est élevé. La responsabilité des plateformes est questionnée.

Droit à l’image : la tokenisation de contenus mettant en scène des personnes pose la question du consentement et du droit à l’image.

Fiscalité : le traitement fiscal des plus-values réalisées sur les NFT reste à préciser dans de nombreux pays.

Droit des contrats : les conditions de vente et d’utilisation des NFT doivent être encadrées juridiquement.

Vers un cadre juridique adapté aux NFT

Face à ces enjeux, plusieurs pistes sont envisagées pour adapter le droit à cette nouvelle réalité :

Révision du droit d’auteur : clarifier le statut juridique des NFT et les droits associés.

Responsabilisation des plateformes : imposer des mécanismes de vérification de l’authenticité des œuvres tokenisées.

Smart contracts : utiliser des contrats intelligents pour automatiser la gestion des droits et royalties.

Registres décentralisés : créer des bases de données partagées pour faciliter l’identification des ayants droit.

Harmonisation internationale : l’Association des Juristes Européens plaide pour une approche commune au niveau européen.

Bonnes pratiques pour les créateurs de NFT

En attendant un cadre légal clair, les créateurs peuvent adopter certaines précautions :

Déposer ses œuvres auprès d’organismes de gestion collective avant toute tokenisation.

Rédiger des contrats détaillés précisant les droits cédés lors de la vente d’un NFT.

Utiliser des outils de traçabilité pour prouver l’antériorité et l’authenticité des créations.

Choisir des plateformes responsables ayant mis en place des procédures de vérification.

S’informer sur la fiscalité applicable aux revenus issus des NFT dans son pays.

Perspectives d’évolution du marché des NFT

Malgré les défis juridiques, le marché des NFT continue de se développer :

Diversification des usages : au-delà de l’art, les NFT s’étendent à d’autres secteurs (musique, jeux vidéo, mode…).

Intégration par les grandes marques : de nombreuses entreprises lancent leurs collections de NFT.

Évolution technologique : développement de NFT plus écologiques et interopérables entre blockchains.

Régulation croissante : mise en place progressive d’un cadre juridique adapté dans plusieurs pays.

Professionnalisation du secteur : émergence d’intermédiaires spécialisés (galeries, experts, assureurs…).

Les NFT représentent une innovation majeure pour la valorisation des créations numériques. Leur développement nécessite cependant d’adapter le droit de la propriété intellectuelle pour garantir une juste rémunération des créateurs tout en luttant contre les abus. Un équilibre délicat à trouver entre innovation technologique et protection juridique.